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De grandes tours réalisées en quelques semaines, des ponts immenses automatisés, des robots pour la maçonnerie. Il ne s’agit pas de projections futuristes, mais de ce qui existe d’ores et déjà. Et ce n’est que le début. Quelles sont les grandes tendances qui bouleversent le secteur de la construction aussi bien en Europe, qu’aux Etats-Unis et en Asie ? Kenny Ingram, Directeur Construction et Contracting chez IFS, décrit trois opportunités à saisir pour les entreprises de ce secteur en 2017.

Tendance #1 : dans les cinq prochaines années, 35% des propriétaires d’actifs adopteront des contrats avec une tarification basée sur la performance

Selon l’étude « Product Lifecycle Management Market – Global Industry Analysis, Size, Share, Growth, Trends and Forecast, 2015 – 2022 » par le cabinet Transparency Market Research, le marché mondial de la Gestion du Cycle de Vie des Produits atteindra plus de 75 milliards de dollars en 2022 avec une croissance annuelle d’environ 8,1% de 2015 à 2022. A l’instar des autres secteurs, cela signifie que les contrats dans la construction deviennent de plus en plus complexes et basés sur les services.

Cela n’est pas une nouveauté. Le concept novateur « Power by the Hour » de Rolls Royce, inventé en 1962, proposait un service complet de remplacement des moteurs et pièces détachées sur la base d’un coût fixe par heure de vol. Récemment, le groupe a lancé les offres « Engine Health Monitoring » pour suivre la performance des ailes des avions grâce à des capteurs embarqués et « Lease Engine Access » pour que les avions au sol puissent bénéficier d’un moteur de remplacement lors des opérations de maintenance. Grâce aux objets connectés industriels, les données recueillies et exploitées par les applications des entreprises favorisent les innovations au service de ces nouveaux business models. Mais la clé pour les entreprises du secteur de la construction est de déterminer clairement l’objectif principal de leurs actifs. Par exemple, si une entreprise construit un hôpital, elle pourrait remporter ce marché grâce à la garantie de livrer, dans un délai imparti, un nombre convenu de lits, voire grâce à un engagement sur le bénéfice « santé » des patients. Elle devra alors être capable de mesurer ces deux aspects. Pour le client, tout ce qui va au-delà de ces performances définies pourrait se traduire par une dépense supplémentaire.

Comment les entreprises peuvent-elle tirer parti de cette opportunité ?
Aujourd’hui, l’Internet-of-Things permet aux entreprises du secteur de la construction des mesures plus précises et fiables que jamais auparavant. Les paramètres essentiels à prendre en compte sont la disponibilité, la fiabilité, la maintenabilité, la souplesse, le coût de propriété et le résultat final. La technologie doit fournir aux entreprises des outils d’analyse et des indicateurs de performance qui leur permettront de définir les modèles les plus rentables, et qui leur permettront de transformer les services en levier d’optimisation. Finalement, les entreprises du secteur de la construction vont être amenées à fonctionner de plus en plus comme les entreprises de services avec un modèle de tarification basée sur la performance.

Tendance #2 : d’ici 5 ans, plus de la moitié des entreprises du secteur utiliseront la construction modulaire et l’impression 3D

Au Royaume-Uni, une entreprise irlandaise construit des maisons durables et des établissements scolaires de standing pour tout le pays. Mais avec une spécificité : ces bâtisses sont construites au sein de son usine puis expédiées et assemblées sur place. Lorsque les assemblages sont finis, il est impossible pour quiconque d’imaginer que ces constructions, de haute qualité, aient pu être réalisées dans une usine.

Tout autour de nous, se trouvent des constructions modulaires. Nous ne nous en rendons pas compte car cela est devenu habituel. Il peut s’agir, par exemple, de points de vente dans les aéroports ou les gares (c’est notamment le cas à l’aéroport d’Heathrow et la gare de Birmingham en Angleterre). Ce type de construction a été pensé pour une durée de vie de 30 à 40 ans. A l’échelle mondiale, l’industrie du logement résidentiel se tourne également vers la construction modulaire.

A Singapour, un nouveau modèle de construction modulaire a récemment été créé : le PPVC (Construction Volumétrique Préfabriquée et Préfinie). Des blocs d’appartements entiers sont ainsi fabriqués sur ce modèle dans une usine locale. Chaque unité distincte est composée des finitions intérieurs, accessoires et raccords. Elles sont toutes fabriquées à grande échelle, transportées puis assemblées sur place. Selon une étude de McKinsey, les entreprises utilisant ce modèle de production réalisent des économies de 50% aussi bien en termes de coût salarial que de délai de livraison des constructions. Cette nouvelle pratique permet par ailleurs à l’entreprise de réduire sa pollution de l’air et sa pollution sonore, tout en améliorant la sécurité de ses ouvriers sur les chantiers.

Dans un contexte où la population mondiale augmente d’un milliard tous les 12 ans, la vitesse et les capacités de production de la construction modulaire et de l’impression 3D en font des solutions de premier plan. L’impression 3D est en train de devenir la règle et non plus l’exception pour de nombreuses entreprises, et son adoption est en plein essor. De nombreux établissements scolaires au Royaume-Uni et en Allemagne utilisent des imprimantes 3D pour former leurs étudiants. En 2016, le cabinet Gartner a publié un rapport dans lequel est prévue une croissance particulièrement forte pour l’impression 3D dans les entreprises de 57,4%. Dans le monde entier, le commerce d’imprimante 3D pour les entreprises a plus que doublé par rapport à 2015. Gartner précise ainsi : « Nous prévoyons que le commerce mondial de l’imprimante 3D augmentera de 98,5% par an jusqu’en 2020. Les dépenses totales vont évoluer de 66,5% par an pour atteindre 17,7 milliards de dollars en 2020. »

Comment les entreprises peuvent-elle tirer parti de cette opportunité ?
Pour les entreprises qui construisent de manière traditionnelle, le passage à la construction modulaire nécessite d’adapter leur business model et d’acquérir un ensemble de nouvelles compétences. Il ne s’agit alors plus d’entreprises de construction, mais d’entreprises hybrides de construction et de fabrication. Intégrer les nouvelles générations d’ingénieurs et les expertises métier les plus novatrices, s’inspirer des processus intégrés et agiles des entreprises de fabrication ; tout cela est vital pour les entreprises qui veulent saisir cette opportunité. En outre, elles auront besoin de ces ressources et de ces compétences en interne. En effet, les clients feront davantage confiance à une entreprise maîtrisant ce service plutôt qu’à celle qui l’externalisera.

Tendance #3 : au cours des 5 prochaines années, 25% des travaux dans la construction seront réalisés par des robots

Les voitures sans chauffeur et les flottes de camions autonomes sont clairement sur le point de devenir une réalité courante. Pourtant, pour beaucoup de professionnels de la construction, ces innovations paraissent encore futuristes. Une étude Pwc publiée en 2016 montre que la Chine est un bon exemple du boom de la demande pour la robotique industrielle : « Depuis 2013, le nombre d’expéditions de robots industriels multifonctions en Chine a presque doublé pour atteindre un volume de 75 000 unités en 2015. La Fédération Internationale de la Robotique en prévoit 150 000 d’ici 2018. »

En Chine, toujours, le SLJ900/32 est un robot commandé à distance qui permet de construire des ponts et qui fonctionne sans aucune technologie grutière traditionnelle. Il se déplace sur le pont en construisant une route temporaire au fur et à mesure qu’il remonte chaque nouveau segment, et évolue entre les colonnes du pont pour déposer chaque segment à sa place. La construction de ponts est très complexe, aussi bien d’un point de vue technique que sécuritaire, et impliquent des polices d’assurance très élevées. Le recours à un robot peut donc être une bonne solution pour les entreprises du secteur.

Actuellement, les ingénieurs explorent des solutions pour les métiers de la construction de haute précision et à fortes compétences. Le robot de maçonnerie SAM100 de l’entreprise américaine Construction Robotics est aujourd’hui commercialisé comme un robot qui « aide le maçon dans ses tâches répétitives et ardues de manipulation et placement de briques. » Cependant, cela soulève le problème du remplacement, à terme, des ouvriers de chantier par des robots.

Comment les entreprises peuvent-elle tirer parti de cette opportunité ?
Peut-être que l’action la plus urgente est de comprendre que le secteur est en pleine mutation, et qu’il est indispensable d’établir une stratégie de transformation digitale. La formation aux nouvelles technologies des ingénieurs en poste et le recrutement des nouvelles générations plus adeptes des technologies vont permettre aux entreprises de tirer leur épingle du jeu. Maquette numérique, réalité augmentée, réalité virtuelle : toutes ces technologies sont extrêmement importantes pour préserver la compétitivité des entreprises. Oser innover et expérimenter est également vital. Le prototypage et les tests de solutions à petite échelle aident les entreprises à saisir ces opportunités qui s’offrent à elles. La transformation digitale est le facteur central qui leur permettra de faire leur révolution. Ses impacts sont aussi puissants qu’ont pu l’être, au début du 20ème siècle, ceux de l’invention de la production de masse.

Depuis qu’elle existe, la construction repose sur des hommes et des machines. Avec la cybernétique, les services et l’accélération des processus, elle va prendre une nouvelle dimension. Les entreprises ne doivent pas rater cette nouvelle révolution.

Pour en savoir plus :

Strategy et PwC: 2016 Industrial Manufacturing Trends

Forbes: 2015 Roundup Of 3D Printing Market Forecasts And Estimates

Strategy et PwC: 2016 Engineering and Construction Trends

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